Il savait qu'elle était là, quelque part, tapie dans l'ombre. Il se fichait de la trahison, de la douleur, des larmes sanglantes qui avaient coulés le long de ses yeux. Il voulait la retrouver, se servir du lien si particulier qu'il avait tisé avec elle en se nourissant à sa gorge pendant si longtemps. Il lui avait donné de son sang et il avait fait naitre quelque chose entre eux, quelque chose qui faisait aujourd'hui battre un coeur ô combien mort. Il ne comprenait pas lui même ce qui lui arrivait. Il avait mal, au plus profond de sa poitrine.

Ce soir, il avait commis un massacre. Il avait tué, sans le moindre respect pour le secret. Le Conseil voudrait sa tête, comme depuis toutes ses années. Mais il en avait besoin. Il voulait se nourrir à la gorge des pires déchets de l'humanité. Le sang pur et toutes ses aberrations étaient mortes alors qu'il devenait fou, rêvant d'arracher une bonne fois pour toute son coeur. Le dandy vampire n'avait plus rien de la créature emplie de noblesse qui sévissait à San Franscico.  

Le vampire avait fini par sortir de l'ombre avec laquelle il avait joué pendant toute la nuit. Il s'était approché d'un appartement où il savait parfaitement qu'Abigaël allait se réfugier en compagnie des deux animaux de compagnie. Elle avait changé de camps, elle avait choisi autre chose et le coeur d'Alexander hurlait sa douleur avec plus de violence que jamais il ne l'avait fait. Le vampire tentait pourtant de faire taire sa colère. Il essayait de faire disparaitre l'ivresse qui le possédait, reste des litres de sang souillé par l'alcool qu'il avait ingurgité trop vite et en trop grande quantité. Il allait la retrouver. Il se le jurait.

Alexander fini par retrouver ce lieu dont il avait presque oublié la présence. Elle était là. Il sentait jusqu'à son odeur si tentatrice et pourtant si traitresse. Durant une seconde, il hésita. Il se jetait dans la gueule d'un loup bien plus terrible que tous ceux qui avaient peuplé les contes de bien des enfances. L'odeur d'Abigaël lui avait été volé. Ce n'était sa princesse des ténèbres qu'il sentait mais une autre. Une créature étrange qu'il ne connaissait pas et qu'on lui avait enlevé. Il tuerait cette petite putain de sorcière qui avait osé poser ses sales pattes sur sa chasseuse. La rage embrumait le regard du vampire, ce même regard fou qui teintait de rouge ses prunelles bleues emplies de larmes.

Dans le plus grand silence, il avança. Les deux humains étaient blotti l'un contre l'autre et il sentait l'odeur des larmes qui avaient coulé sur leur joue. L'homme s'était réveillé. Abigaël n'était pas avec eux et il la trouva à la cave. Le regard du vampire embrassa son corps, caressant sa peau. Il avait envie de la prendre dans ses bras et de lui murmurer des excuses pour la première fois sincères. Il avait cru la perdre...



Mais elle n'était plus humaine, son parfum soufflait autre chose. Une odeur alléchante qui rompait de secondes en secondes le lien qui unissait le vampire et la chasseuse. Il la perdait. A moins qu'il ne l'ait déjà perdu pour l'éternité. Elle deviendrait une protectrice. Et si Faith ne s'était pas trompée, elle était destinée à sauver l'héritière de la magie, celle qui ferait pour de bon disparaitre les vampires de la planète.

Ils sont enfin rentrés, sains et saufs ; du moins pour deux d'entres eux. Faith les a transporté en dehors de l'île aux horreurs afin qu'Abigael puisse les mener jusqu'à chez elle - Un appartement sur deux étages, simplement décoré. La chasseuse est sauve elle aussi, mais saine c'est une toute autre histoire. Elle n'est plus la même, ça se voit dans ses yeux, ça se lit sur son visage. Quelque chose a changé et la magie de Faith n'est pas la véritable cause.

Contrairement à Shiloh et Faith, Abigael ne dort pas. Après s'être douchée et changée, elle est descendu à la cave ; du moins ce qui devrait être une cave. Cette dernière est en réalité son repaire - là où elle fabrique ses armes, ses poisons. Là où elle fait ses expériences. Son laboratoire... son monde. Voila plusieurs longues minutes qu'elle se trouve face à son étagère ; celle où sont disposées une dizaine de cage. Chacune d'elles contient un rat avec un numéro bien précis. Pour six d'entres elles, les barreaux sont bien attaqués et les éléments qui se trouvaient à l’intérieure sont déchiquetés en lambeaux. Les rongeurs sont étendus là, sans vie, tandis que dans les autres cages ils semblent être en pleine forme. La blonde, dont le visage est impassible, souffle avant d'ouvrir l'unes d'entres elles pour attraper l'un des cadavres. Elle prélève un peu de sang avant de l'étaler sur une lamelle et de l'observer au microscope.
En se faisant, elle sent une présence venir à elle, elle entend son prénom être souffler dans l'air. Pourtant, la chasseuse reste parfaitement immobile. Elle sait quel vampire est ici et, même si la totalité de ses muscles ne désirent qu'une chose : lui sauter à la gorge, elle continue ce qu'elle est entrain de faire.

Lance t-elle, la voix piquée de glace alors que son regard ne prend même pas la peine de se poser sur lui.

La cave est froide, même pour la peau du vampire. Il regarde les rats sans vraiment les voir, entendant leurs glapissements alors qu'ils captent la présence du prédateur. Leurs couinements font naitre en lui des souvenirs, des brides du passé qui viennent éclater à ses oreilles, lui hurler les hurlements de sa mère alors que le bucher l'emportait. Ils les voient se tortiller, se jeter un dernier regard. L'odeur des flammes danse quelques secondes sous son nez puis la voix glaciale d'Abigaël met fin à tout.

Les souvenirs se meurent. L’atmosphère s'en encore rafraichie. La chasseuse ne le regarde pas, ne daignant pas même se tourner vers lui. Il sent sa colère et sa rage dans le lien entre eux qui se meurt. Il la sent s'échapper et pourtant il tente de la retenir mais elle file comme de l'eau entre ses doigts. Il aimerait s'approcher, la toucher, la faire revenir. Se la réapproprier. Mais il ne bouge pas. Le silence se fait plus épais alors que le vampire tente de se concentrer. Il voit des choses qui ne sont pas là, le sang salis des mortels qu'il avait tué faisait resurgir des souvenirs douloureux. Il la voit, si jeune et si prometteuse. Il la voit transformer l'adoration qu'elle lui portait en un amour aussi pur qu'elle aurait dû l'être s'il ne l'avait arraché à son destin. Elle devait savoir. Tout savoir avant de pouvoir pour de bon le haïr.



Bien trop tard, il en avait conscience. Et pourtant il avait voulu l'aider. Il se mentait si bien. Il l'avait aidé car il gagnait quelque chose en retour. Car sa curiosité avait été piqué au vif et qu'il voulait de l'aide pour lutter contre des Originaux qui n'étaient qu'une menace mystérieuse. Cadavrius avait surement mentit. Il devait simplement tomber entre les griffes de Salazar et souffrir pour une éternité qui ne serait que trop longue. Il avait été trahit. Il l'avait trahit. Abigaël pouvait le haïr autant qu'elle voulait. Mais il voulait simplement la voir une dernière fois, lui offrir le coeur qui ne battait plus dans sa poitrine avant de partir. De quitter ce monde trop vieux pour lui. D'échapper au Conseil jusqu'à dernière lueur de la nuit. pour un jour laisser le soleil l'embrasser une dernière fois.

Je suis désolé... Ces mots piquent aussitôt Abigael au vif. Elle serre les poings, s'interdisant de se retourner pour lui en coller une. Mais les mots qui suivent sont de trop... il est venu oui, mais pourquoi? Pour qui? Surement pas pour elle. Il serait venu plus tôt sinon. Elle n'aurait pas eu a subir tout ça, elle n'aurait pas été obligé de faire ce qu'elle a fait.
La chasseuse se retourne subitement vers Alexander, posant enfin ses yeux bleus parés d'un vert luisant sur lui. Rien de doux ne s'y lit, il n'y a que de la colère, que de la rage. Elle le hait, elle le hait de tout son cœur... cœur qui ne bat que pour lui.
Lance t-elle, méprisante, en insistant sur le véritable prénom du vampire qu'elle ne connaissait pas jusque là. Elle s'avance vers lui tandis que ses mains se mettent doucement à trembler.
Grogne t-elle avant de s'arrêter face à lui, tout prêt.

Son regard sombre se glisse dans le sien, sondant son âme d'une prestance jusque là inexistante. Elle est méconnaissable. Elle n'est plus l'Abigael qu'il connait ; elle est possédé par un monstre. Une créature vicieuse qui la ronge de l’intérieur, qui prend possession de son corps et de son esprit, mais pas de son cœur. C'est ce même cœur qui la retient de lui sauter à la gorge. Qui la retient de suivre ce nouvel instinct : tuer.
Dit-elle, la voix piquée de tristesse cette fois ci, avant de se tourner à nouveau pour s'éloigner.

Le regard qui se pose sur lui est dénué de toutes lumières, si différents, empli d'une lueur verte qu'Alexander ne lui a jamais vu. Le coeur mort du vampire se serre aux paroles de sa chasseuse. Mais il ne répond rien, se contentant du silence. Elle a raison mais également terriblement tord. Elle ignore bien trop de détail.

Elle s'approche de lui et ce qu'il lit dans ses yeux fait frémir l'immortel. Elle n'est plus cette enfant ayant grandit trop vite qu'il avait modelé selon ses désirs. C'était une femme adulte à l'odeur enivrante qui se dressait devant lui, brulante de rage et de haine à son égard. Elle voulait sa tête et pourtant, le vampire ne bougeait pas d'un centimètre. Abigaël avait tenue tête à Cadavrius. Dans tous les cas, il n'avait aucun chance si elle voulait le détruire. Mais elle ne le faisait pas, se contentant de fixer ses yeux rougis.

Il aimerait la retenir alors qu'elle s'éloigne mais il a peur. peur de ce qu'il déclenchera s'il la touche. peur de la chaleur qui s'échappe de sa peau. Qu'as-tu fais Abigaël ? voudrait-il murmurer. Il ne comprends pas ce qu'elle est devenue. Elle est plus qu'une protectrice aujourd'hui. Quelque chose de d'étrange, une créature qu'il n'a jamais vu nul part. Un monstre qu'Isolda a fait naitre en laissant croire à un libre arbitre qui n'a jamais existé.



Je n'en ai pas eu le temps que hurlait son regard. Il gardait pourtant la tête basse, le coeur au bord des lèvres. Il avait envie qu'elle se blottisse dans ses bras, comme autre fois, petite chose fragile qu'il réconforterait. Mais elle n'était plus la Abigaël qu'il avait connu. Restait-il la moindre chose de cette jeune fille pleine de vie qui l'avait emmené danser voilà ce qui lui semblait une éternité. Où était la blonde qui arrivait à le faire sourire et même rire ? C'était un mur de glace qui se trouvait devant lui.



Il aurait du partir et pourtant il restait là, comme un idiot, à attendre en se perdant dans les yeux de la jeune fille devenue femme trop rapidement. Il aurait dû lui dire la vérité. Mais les mots se bloquaient dans sa gorge, refusant de sortir, de venir caresser la peau d'Abigaël. Il se terrait dans ses secrets comme il l'avait toujours fait. Elle ne pouvait comprendre. Il voulait juste qu'elle lui pardonne. Il se fichait de savoir ce qu'elle était devenue, quelle était cette odeur enivrante qui s'échappait de sa peau. Non... Il voulait juste retrouver la femme qu'il aimait avec une violence que seule l'immortalité pouvait offrir.

Abigael sent qu'il frémit. Elle sent qu'il est troublé, qu'il ne la reconnait plus. Il a raison, elle n'est plus la même. Il ne peut même pas imaginer à quel point.
Elle croise ses bras contre sa poitrine en s'éloignant de lui. Plus elle s'éloigne, plus elle a froid, plus elle souffre. Elle découvre à quel point elle a besoin de lui, à quel point elle a besoin de sa chaleur qui n'existe pas. Il lui manque mais, aujourd'hui, elle refuse de lui offrir quoi que ce soit. Il l'a trahi, il lui a mentit. Plus que jamais, il l'a détruit.

Dit elle avant de se tourner doucement et de poser de nouveau ses yeux sur lui.

Sait-elle seulement qui elle est elle même? Abigael est perdu. Son esprit vivace l'épuise. Elle réfléchit trop, beaucoup trop. Tout était si simple avant ; elle était à lui, elle n'avait pas de question à se poser. Lui obéir, le satisfaire. Voila ce a quoi se résumait sa vie. Qu'est ce qu'elle doit faire maintenant? Qu'est ce qu'elle va devenir?

Il n'y a pas d'autres chasseuses Abigaël. Il n'y a que toi. Les mots font s'emballer fougueusement son cœur dans sa poitrine, signe que les sentiments ne sont pas morts. Cette sincérité qu'elle voit dans son regard la trouble. Elle a une folle envie de se jeter sur lui mais, cette fois ci, pas pour lui faire du mal. Elle veut se blottir dans ses bras. Elle veut le croire. Pourtant, son instinct le lui refuse, le lui interdit. Il ment, elle le sait. Elle ne veut plus souffrir par sa faute.

Constate t-elle, la voix faible, avant d'ajouter.

Ses bras se décroisent, le visage dur et pourtant si triste. Elle n'est plus qu'un fantôme, voila ce qu'elle pense être aujourd'hui. Un fantôme dangereux pour les vampires, un fantôme dangereux pour Alexander.

Ses sourcils se froncèrent, mais non d'énervement. Non c'était autre chose, comme s'il tentait de lire les pensées de la chasseuse, comme s'il tentait de voir derrière les prunelles si étranges que le fixait aujourd'hui, si différente de celles d'autres fois. Qu'était devenu sa petite princesse, qu'était devenu Abigaël. Elle sentait le monstre, l'horreur mais également un désir fou. Elle sentait une odeur si particulière qui n'était pas la sienne. Alexander aurait aimé être dégouté par ce qu'il sentait. Il aurait aimé ne plus la désirer maintenant qu'elle était tout autre. Mais c'était impossible. La magie l'attirait, plus puissante encore que n'importe quel sang. Il était un papillon fasciné tournant lentement autour de sa flamme. Son coeur sentait la puissance, celle qui avait autrefois roulé dans sa propre hémoglobine.



Le puissant vampire, si fort, si imperturbable n'avait plus rien à voir avec le dandy qu'il se plaisait à être. Son coeur hurlait, faisant battre sa poitrine. Il était tombé amoureux, comme les faibles qu'il avait autrefois tué pour cette simple raison. Les amants se sacrifiaient et pensaient à deux esprits plutôt qu'en solitaire, se rendant en le désirant encore plus facile à détruire. Et voilà que lui ce faisait avoir, se laissait embarquer dans des histoires trop sombres. Il avait à nouveau vendu son âme et s'était fait avoir comme un débutant. Cadavrius avait depuis le début prévu de le trahir.



Alexander n'avait jamais caché son égoïsme. Abigaël était au courant de tout ce qui avait pu se tramer dans l'esprit du vampire. Mais elle ne le connaissait pas assez bien. Elle ne savait pas tout. Et lui non plus.



Du regard, le vampire embrassa les cages où se terraient les rats depuis que l'immortel était entré dans la pièce. Les animaux étaient plus intelligents que les hommes. Ils se faisaient plus discrets lorsque l'odeur du prédateur ultime parvenait jusqu'à leurs narines. Alexander voulait savoir ce qu'avait fait Abigaël et quelle sombre secret elle avait fait naitre.

Abigael s’aperçoit qu'il la scrute, qu'il tente de lire dans son esprit. Elle le fixe elle aussi, elle le défi. Mais elle se perd dans son propre jeu, dans ses yeux si bleus, dans cette sincérité qu'elle n'a jamais connu. Dans cette sincérité qu'elle ne veut pas croire.

Je n'ai pas su te protéger comme je l'aurais dû.
Murmure t-elle, la voix cassé par son cœur qui se serre. Par le désir de se jeter dans ses bras.

Je ne pouvais mourir pour toi. Ses dents se referment sur sa lèvre inférieur. De quoi est-il réellement capable pour elle? Qu'est ce qu'il ressent vraiment? Abigael doute. Elle doute dans les deux sens. Il tient à elle sans y tenir. Et elle, qu'est ce qu'elle ressent vraiment? Elle est perdu, totalement perdu.

Ensuite, il la questionne. Il lui pose beaucoup trop de questions. Des questions qui font bouillonner son sang. Elle se tourne à nouveau pour se diriger vers son bureau. Elle attrape un bistouri et plante son regard de braise sur lui.

Elle coupe soudainement la paume de sa main, laissant sa chaire se fendre sous la lame tranchante et le sang couler lentement. Elle lâche le bistouri qui s'écrase au sol en même temps que des gouttelettes d'hémoglobines. Abigael lève la main, la montrant d'avantage à Alexander. Elle sait ce que ça va lui faire. Elle sait que ça va le rendre fou. Son sang est un poison. Alex sera t-il capable de résister? Sera t-il assez fort pour ne pas tuer sa chasseuse? Abigael le test. Elle veut savoir et, pour ça, elle prendra tout les risques qu'il faut. Elle se met lentement à marcher, telle une prédatrice entrain de séduire sa proie. Toutefois, elle garde ses distances.

L'emporter lui? Elle ne sait pas si elle en est véritablement capable. Quoi qu'il en soit, elle le saura surement d'ici peu de temps.

L'odeur du sang déchaine ses passions, déchaine son coeur et son âme. Il est drogué, détruit jusqu'à la moelle. pourquoi fait-elle ça ? Elle sait parfaitement qu'il ne saura se contrôler. Les ongles du vampire s'enfoncent dans sa main, déchirant la chair pour lui permettre de garder un peu de contrôle. pour tenter de le maintenir en vie. Ses yeux s'embrassent, ses iris se sont déjà dilatés, envie par l'envie folle de faire taire cette odeur, de s'accaparer de son sang, de la faire sienne dans une douleur qu'elle a déjà connu entre les mains glacées de Salazar. La pensée de son Sire calme immédiatement le coeur du vampire. Il doit se calmer, l'imaginer entre les reins de son Sire, imaginer ce qui a pu se passer. Avec horreur et effrois mais ses pensées horribles le calme. presque.

Ses sourcils se froncent alors qu'il la voit, si semblable à une louve dans ses tentatives de séduction. Elle ondule autour de lui, animal cruel jouant de ses plus bas instincts, jouant avec l'envie du sang qui coule encore dans la paume d'Abigaël. Comment ose-t-elle.



Son air distingué, ses mots choisis avec soin. Tout n'était qu'un très lointain souvenir. Il redevenait le mortel violent qu'il avait été, guidé par l'envie de lui sauter à la gorge pour boire jusqu'à en mourir le liquide tentateur dans ses veines. Mais la simple image de Salazar entre ses reins lui permettait de se contrôler. D'essayer.

Abigael voit naître la tentation sur le visage du vampire. Elle voit naître la bestialité dans son regard. Son instinct primitif prendre doucement le dessus sur sa raison. Sera t-il capable de se jeter sur elle pour tenté de mettre fin à ses jours? Pour boire ce sang qui lui sera mortel? Elle n'en sait rien et pourtant, elle continue de le narguer par son attitude provocatrice et par le liquide rougeoyant qui coule de sa main.

Toutefois, la chasseuse est brutalement stoppée par les mots d'Alexander. Refroidit. Elle s'immobilise en laissant son bras retombé le long de son corps, fixant de son regard de jade celui qui résiste si bien à son désir. Comment fait-il? A quoi pense t-il pour ne pas se jeter sur elle? Que ressent-il? La blonde se perd dans ses propres actes, elle ne sait que faire. Le tuer, ça, ça lui est de toute évidence impossible. Lui demander de mettre fin à ces jours aussi. Qu'est ce qu'elle recherche alors? Qu'est ce qu'elle veut véritablement?
C'est son corps qui parle pour elle. C'est la douleur d'y croire qui prend le dessus sur sa raison. Son cœur bat irrémédiablement dans sa poitrine et il bat dans sa direction. Elle a beau être une Protectrice, elle est avant tout la chasseuse d'Alexander.
Réussi t-elle a murmurer avant qu'elle ne perde pour de bon le contrôle.

Elle s'avance rapidement vers lui, faisant d'ailleurs mine de littéralement se jeter sur lui. Pourtant aucun de ses gestes ne sont menaçant. Elle enlace sa nuque de ses bras avant de s'accaparer de ses lèvres, lui offrant un baiser dont la fougue est inégalable. Pourquoi fait-elle ça? Elle n'en sait foutrement rien. Tout ce qu'elle sait, c'est que ce baiser éveille en elle un désir de vivre, plus que jamais... et la tristesse de savoir que la mort l'attend patiemment. Demain, après demain. La semaine prochaine ou dans un an. Elle n'en sait encore rien. Alors, les larmes se mettent à couler sur ses joues sans que ses lèvres ne daignent quitter les siennes. Pourquoi a t-elle fait tout ça? Pourquoi s'est-elle sacrifié ainsi? Pour avant tout le voir une dernière fois.

Il aurait encore eu un coeur, il aurait pleuré. Il aurait laissé son palpitant hurler dans sa poitrine, il l'aurait serré avec plus de force que jamais. Il en avait envie. Mais c'était sa curiosité malsaine qui le faisait maintenant avancer. Il avait besoin de savoir. Et pourtant, il se laissait enivrée par la chaleur de la chasseuse, il se laissait porté par la fureur de son baiser. Son corps tout entier brulait alors que sa soif se faisait plus forte. Trop forte. Il avait faim et ses iris totalement dilatée voulait tout dire. Elle le testait. Elle n'attendait qu'une seule chose qu'il attaque. Et la fureur de ses lèvres lui donnait encore plus envie de glisser sa langue sur son cou et mordre, jusqu'à mourir de ce sang trop odorant.

Il la repoussa finalement. La peur faisait vibrer son corps presque autant que la rage qu'il avait de vouloir attaquer, mordre et boire, boire jusqu'à en mourir. Se rendre vers d'autres cieux, se rendre vers d'autre monde. Disparaitre en emportant avec lui le corps de cette créature dont il était tombé amoureux comme l'imbécile qu'il serait toujours.



Il ne pouvait l'avoir aussi près de lui. Même s'il mourait d'envie, il n'en avait pas le droit. Il avait envie d'essuyer ses larmes. Il avait envie de la serrer contre lui. Mais tant qu'elle sentirait cette odeur enivrante, il n'en avait pas le droit. Il pouvait la tuer au moindre mauvais geste. Si elle était puissante, il restait un vampire. Il restait plus rapide et surtout plus dangereux. Elle prenait trop de risque. Il avait prit trop de risque en venant la voir. Et il passait pour un immortel trop froid. Comme ce qu'il aurait du être dans le gel qui avait prit par de son coeur.

Les mains violentes du vampire finissent par repousser la blonde. Elle le regarde, surprise, presque frustrée d'un tel refus. Elle avait envie, elle. Elle avait envie de lui. Elle avait envie de s'oublier, d'oublier tout ça. De lui pardonner, de lui faire ses adieux, à sa façon. Mais il refuse. Il veut savoir, alors qu'elle même ne sait pas. Elle ne se rend pas encore vraiment compte de la tentation qu'elle provoque chez lui, et qu'elle provoquera chez les autres vampires. En réalité, elle ne cherche même pas à comprendre. Elle a autre chose en tête, maintenant.
Lance t-elle alors, froidement, en le fusillant du regard.

Elle ne lui appartient plus, du moins plus entièrement. Aujourd'hui elle sent, elle sent qu'elle doit se rendre quelque part, prêt de quelqu'un d'autre que lui. Mais qui? Elle doit savoir, elle doit chercher, et elle compte bien le découvrir.
La chasseuse se retourne, attrapant un vulgaire torchon pour s'essuyer la main qui ne saigne presque plus, avant de le balancer sur la table.
Grogne t-elle en enfilant une longue veste noir. Une veste qu'elle a l'habitude de mettre alors qu'elle s'apprête à chasser.

Elle ouvre un placard, laissant les yeux du vampire découvrir les armes qu'elle a elle même crée. Des armes dont il ne connait même pas l'existence. Abigael a fait beaucoup de chose dans son dos, plus qu'il ne peut l'imaginer. Il n'a jamais eu le contrôle total sur elle. Il a voulu dompter une Protectrice et, même si elle n'a pas conscience de sa condition, elle est tout bonnement indomptable.
La chasseuse s'empare de son arbalète pour la glisser derrière le pan de sa veste, accrochée à sa ceinture, ainsi que de trois pieux. Ces pieux que Faith lui a offert. Faith. Que va t-elle faire de la sorcière et de son petit copain? Elle ne sait pas. Ils resteront ici, surement, le temps qu'ils trouvent un endroit plus sur pour eux. Elle leur doit beaucoup, et pour ça elle les protégera aussi longtemps qu'il le faut.

A présent Abigael veut partir et, tout en ignorant le vampire, elle se dirige vers la porte de sortie.

Comment peut-elle ? Elle n'est plus la même. Elle n'a plus rien de celle dont il a hanté les rêves et les cauchemars, dont il a possédé la couche pendant si longtemps. Il doit se rendre à l'évidence. Il la perd. Avec une facilité déconcertante.

Il la regarde récuperer des armes, sans même froncé les sourcils. Il n'y a rien d'autre que de l'abattement dans le regard qu'il porte sur la chasseuse. Il aimerait revenir en arrière. L'empecher de partir ce fameux soir qui avait tout déclanché et lui semblait pourtant avoir eu lieu des années plus tôt. Elle ne serait jamais tombée entre les griffes de Salazar, elle n'aurait jamais eu le pouvoir qui la possèdait maintenant et qu'il sentait dans le moindre de ses muscles; La magie roulait sous les veines de celle qui n'avait jamais été une sorcière. Sa lignée ne comptait que les plus parfaits des protecteurs; Dire qu'il l'avait avec lui depuis toujours. Et qu'aujourd'hui elle partait, le laissant comme un malpropre, le coeur en miette.



Ses mots se fondaient dans l'air jusqu'à l'oreille aiguisée de la jeune chasseuse. Elle se retournerait. Mais c'était déjà trop tard. . Il refusait de la laisser partit pour un destin où ne l'attendait que le sang. Les prophéties ne mentaient jamais dans le monde de la magie. Et pourtant, il devait la laisser courir jusqu'à son futur. Sans lui.



Il tourne alors les talons, sans lui laisser le temps de lui répondre.